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Compétence du parquet national financier dans un litige franco-russe
Veille juridique
17 novembre 2020
Cass. Crim. 1er avril 2020, N° 19-80.875, FPBRI
Dans cette affaire, le procureur de la République financier avait ouvert une enquête sur des fonds ayant permis à un couple russe d’acquérir un hôtel à Courchevel. Ces fonds étaient suspectés d’être le produit de détournement de fonds publics commis par les époux au préjudice des municipalités de la région moscovite. La question de la compétence matérielle du parquet national financier (PNF) pour connaître du blanchiment d’infractions commises à l’étranger a alors été posée devant la chambre criminelle. Pour rappel, le PNF a été institué par la loi n° 2013-1115 du 6 décembre 2013 dans un projet de refonte de la justice économique et financière pour mieux lutter contre la corruption et la fraude fiscale.
L’article 705 du code de procédure pénale définit les contours de la compétence du PNF qui s’exerce sur l’étendue du territoire national. Le numéro 6° de cet article dispose que le PNF peut poursuivre le blanchiment de certains délits s’ils revêtent un caractère de complexité. Dans le cas d’espèce, la Cour de cassation montre que cette complexité est caractérisée au regard de « la dimension internationale des faits, la présence de multiples sociétés écrans dans plusieurs pays considérés comme des paradis fiscaux et des circuits de blanchiment complexes ». De plus, elle affirme l’autonomie de l’infraction de blanchiment par rapport à l’infraction d’origine. Ainsi, il n’est pas nécessaire « que l’infraction ayant permis d’obtenir les sommes blanchies ait eu lieu sur le territoire national ni que les juridictions françaises soient compétentes pour la poursuivre ». Le PNF est donc compétent pour enquêter sur le blanchiment en question.
Pour justifier sa position, la chambre criminelle se rapporte aux objectifs posés par le législateur dans sa loi de 2013, à savoir la lutte contre les formes les plus complexes de la délinquance économique et financière.
Néanmoins, une question reste en suspens. Dans son dernier point, la Cour précise que l’infraction d’origine, à savoir le détournement de fonds au préjudice de personnes publiques, est répréhensible à la fois en France, en vertu de l’article 432-15 du code pénal, et en Russie. Cette vérification serait-elle une condition pour déclarer le PNF compétent ? Autrement dit, la Cour soumettrait-elle la compétence du PNF à une exigence de double incrimination ?