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Brevet – Refus d’octroi d’un CPP pour une nouvelle application thérapeutique d’un principe actif de médicament ayant déjà obtenu une première autorisation de mise sur le marché
Veille juridique
22 octobre 2020
CJUE, 9 juillet 2020, aff. C-673/18, Santen SAS c/ Dir. INPI
Cette décision rendue par la grande chambre de la CJUE est un revirement important qui affirme désormais clairement que l’article 3.d) du Règlement (CE) 469/2009 concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments (CPP), selon lequel ce titre de propriété ne peut être délivré que sur la base de la première autorisation de mise sur le marché (« AMM ») pour le produit en tant que médicament, doit être interprété strictement.
En l’espèce, le laboratoire pharmaceutique Santen est titulaire d’un brevet européen (FR) déposé le 10 octobre 2005 et protégeant notamment le principe actif de la ciclosporine. Il a obtenu une autorisation de mise sur le marché (« AMM ») le 19 mars 2015 pour commercialiser le médicament Ikervis contenant ledit principe actif afin de traiter la kératite chez les adultes (inflammation de la cornée de l’œil).
Le 3 juin 2015, une demande de certificat complémentaire de protection [1] (« CCP ») est demandée auprès de l’INPI pour la ciclosporine sur la base de l’AMM du 19 mars 2015. Celle-ci est finalement rejetée le 6 octobre 2017, l’article 3.d) du Règlement (CE) 469/2009 concernant le CPP exigeant comme condition d’octroi d’un CPP que l’AMM soit délivrée pour la première fois. Or, la ciclosporine avait déjà obtenu antérieurement une AMM pour un autre médicament dénommé Sandimmun.
Le laboratoire Santen a effectué un recours devant la Cour d’appel de Paris. Celle-ci a alors évoqué l’arrêt Neurim Pharmaceuticals rendu par la CJUE le 19 juillet 2012 (C-130/11) qui ne s’opposait pas à ce que soit délivré un CPP pour une application thérapeutique différente d’un produit déjà connu dès lors que cette application entrait dans le champ de protection conféré par le brevet de base, et ce malgré l’existence d’une AMM antérieure.
Il s’agissait donc de déterminer si un CPP doit bénéficier uniquement à la première application thérapeutique d’un principe actif ou s’il peut également être obtenu pour les nouvelles applications successives d’un même principe actif.
La Cour d’appel a décidé de poser deux questions préjudicielles à la CJUE afin de clarifier la portée des notions développées par elle dans son arrêt Neurim et sur l’interprétation de l’article 3.d) du Règlement (CE) 469/2009.
En premier lieu, la CJUE rappelle la définition d’un « produit » au sens du Règlement (CE) 469/2009 et conclut qu’une nouvelle application thérapeutique d’un principe actif ou d’une combinaison de principes actifs ne saurait être qualifiée de produit distinct.
En second lieu, la Cour affirme clairement, contrairement à ce qu’elle avait pu retenir dans l’arrêt Neurim, que « pour définir la notion de première AMM du produit en tant que médicament, au sens de l’article 3.d) du règlement (..) il n’y a pas lieu de prendre en compte le champ de protection du brevet de base ».
Par conséquent, la Cour déduit de ces développements qu’une AMM ne peut être considérée comme la première AMM, au sens de l’article 3.d) du Règlement, lorsque celle-ci porte sur une nouvelle application thérapeutique d’un principe actif ou d’une combinaison de principes actifs, qui a déjà fait l’objet d’une AMM pour une autre application thérapeutique.
Un CPP ne peut donc être octroyé pour une seconde application thérapeutique et doit rester cantonné à la protection de la première application thérapeutique d’un principe actif incorporé dans un médicament.