BREVETS – Le préjudice subi résultant de la contrefaçon ne peut être réparé par l’allocation d’une somme forfaitaire, aux lieu et place du calcul du préjudice subi que si la victime en fait expressément la demande

Type

Veille juridique

Date de publication

22 juillet 2021

Cour de cassation, Ch. comm., 17 mars 2021, pourvois n°B 17-28.221 et Y 18-19.206 – La Cour de cassation casse et annule l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 22 septembre 2017 qui avait alloué d’office une somme forfaitaire en réparation du préjudice résultant de la contrefaçon.

Afin de réparer le préjudice résultant de la contrefaçon, l’article L615-7, alinéa 1er, du code de la Propriété Intellectuelle dispose que les dommages et intérêts sont fixés en prenant en considération distinctement :

  • Les conséquences économiques négatives de la contrefaçon, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
  • Le préjudice moral causé à cette dernière ; et
  • Les bénéfices réalisés par le contrefacteur, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirés de la contrefaçon.

Toutefois, le second alinéa de cet article prévoit qu’à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, la juridiction peut allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte.

En l’espèce, les sociétés DECATHLON FRANCE et KNAUER ont été condamnées, par un arrêt de la Cour d’appel de Paris du 16 décembre 2014, pour contrefaçon du brevet de la société TIME SPORT couvrant un dispositif de fixation occipitale pour casque. L’arrêt a également confirmé la mesure d’expertise ordonnée, avant-dire droit, sur l’évaluation du montant du préjudice.

Après dépôt du rapport d’expertise, la société TIME SPORT a demandé le paiement de la somme de 1.754.453€ à la société KNAUER, telle qu’estimée par l’expert sur la base d’un taux de marge brute identique à celui de la société DECATHLON FRANCE.

Par un arrêt du 22 septembre 2017, la Cour d’appel a retenu qu’il ne pouvait pas être alloué la totalité de ce montant, dans la mesure où il ne correspondait pas au bénéfice de la société KNAUER. Par conséquent, il convenait de calculer le préjudice de la société TIME SPORT au regard de la redevance qu’elle aurait pu percevoir sur le chiffre d’affaires réalisé au cours de la période de référence de la contrefaçon, soit 28 620,90€.

La société TIME SPORT a alors formé un pourvoi contre cet arrêt. Elle alléguait ne pas avoir sollicité une réparation de son préjudice sous la forme d’une somme forfaitaire mais en considération des bénéfices retirés par la société KNAUER de la contrefaçon.

La Cour de cassation retient que la Cour d’appel qui n’a pas été saisie d’une demande de redevance majorée ne pouvait pas allouer, de sa propre initiative, le montant des redevances qui auraient été dues à la société TIME SPORT en cas d’autorisation d’utiliser le brevet. La Cour d’appel devait par conséquent prendre en considération la demande d’indemnisation fondée sur l’un des critères d’évaluation prévu par l’article L615-7 al. 1 du code de la propriété intellectuelle.

Ainsi, la Cour de cassation casse et annule l’arrêt du 22 septembre 2017 de la Cour d’appel de Paris en ce qu’il a condamné la société KNAUER à payer à la société TIME SPORT la somme de 28 620,90€, et renvoie les parties devant la Cour d’appel de Paris autrement composée.

L’indemnisation sous la forme d’une somme forfaitaire ne peut donc être ordonnée par une juridiction qu’à la condition que la victime de la contrefaçon en ait fait la demande expresse.

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