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Les sociétés mères bientôt responsables des fautes de leurs filiales ?
Droit Pénal
11 mai 2015
UN PROJET DE LOI EST ACTUELLEMENT EN LECTURE À L’ASSEMBLÉE NATIONALE, METTANT EN PLACE UN DEVOIR DE VIGILANCE À LA CHARGE DES SOCIÉTÉS MÈRES POUR L’ACTIVITÉ DE LEURS FILIALES ET SOUS-TRAITANTS – PROPOSITION DE LOI N°2578 RELATIVE AU DEVOIR DE VIGILANCE DES SOCIETES MERES ET DES ENTREPRISES DONNEUSES D’ORDRE
Un nouveau projet de loi sur le devoir de vigilance des sociétés mères est actuellement en lecture au Parlement.
Ce projet entend instaurer un régime spécial de responsabilité, basé sur l’obligation pour certaines sociétés de mettre en place un plan de vigilance.
Ce plan aurait pour objectif d’identifier et prévenir : « la réalisation de risques d’atteintes aux droits de l’homme et aux libertés fondamentales, de dommages corporels ou environnementaux graves ou de risques sanitaires ».
Les sociétés concernées seront celles qui emploient plus de 5 000 salariés sur le territoire français, ou plus de 10 000 salariés en France et à l’étranger, en tenant compte des filiales directes ou indirectes.
La particularité de ce texte réside dans le fait que la société mère devra prendre en compte les risques : « résultant de ses activités et de celles des sociétés qu’elle contrôle directement ou indirectement, ainsi que les activités de leurs sous-traitants ou fournisseurs sur lesquels elle exerce une influence déterminante ».
La loi instaure donc à la charge des sociétés mères une obligation de contrôler l’application des lois par d’autres sociétés.
Il s’agit d’une sorte de privatisation du contrôle de l’application des lois.
De plus, le texte visant les filiales étrangères, les sociétés mères françaises pourraient être invitées à faire respecter le droit français à l’étranger, ce qui pose de véritables questions sur le plan du droit international privé.
Si le plan n’était pas mis en place, une astreinte pourra être ordonnée et une amende civile pourra éventuellement être prononcée.
Le texte prévoit en outre qu’en cas de dommage effectivement causé, la réparation s’effectuerait selon le droit commun de la responsabilité.
La loi créerait donc bien une responsabilité spéciale, qui aurait vocation à jouer indépendamment de tout dommage.
Au niveau pénal, le texte précise que « les mesures du plan visent également à prévenir les comportements de corruption active ou passive au sein de la société et des sociétés qu’elle contrôle ».
Ce texte pourrait donc conduire à rendre responsable la société mère qui n’a pas mis en place le plan de vigilance (par exemple par le jeu de la complicité).
Par ailleurs, en créant une nouvelle obligation de prudence et de sécurité, ce projet de loi risque d’étendre la responsabilité pénale des personnes morales en matière d’infractions non intentionnelles et de risque causé à autrui ; la caractérisation d’une faute d’imprudence ou d’une faute délibérée supposant qu’une obligation légale ou réglementaire de sécurité ou de prudence ait été violée.
Enfin, si aucune sanction pénale n’est prévue, l’amende civile encourue en l’absence de plan pourrait atteindre, en l’état actuel du texte, 10 millions d’euros.
La sanction ne cache pas sa vocation répressive, le droit pénal lui-même n’atteignant ce type de montant qu’en de rares domaines.
Ce texte n’en est actuellement qu’au stade du projet de loi, mais les lourdes obligations qu’il envisage justifient d’en suivre attentivement les évolutions.